vendredi 9 juillet 2010

Chronicature : Sondage second tour 2012 : Aubry : 52%, Sarkozy, 48%


Version corrigée : les échos que j’ai pu recevoir de cette chronicature telle qu’elle était écrite laissaient entendre que mes jugements étaient hâtifs. Cette nouvelle mouture développe donc certains points.

Certes, il est un peu tôt pour des sondages d’un second tour qui n’aurait éventuellement lieu que dans deux ans… Et c’est justement en cela que cette étude est représentative : le PS, qui n’a pas encore de véritable programme, est préféré à un président qui est supposé être en train de mettre en œuvre le sien. Ce n’est donc pas une projection de combat de programme, ni même d’idées dont il est question, comme cela aurait été le cas dans une projection Strauss-Kahn – Sarkozy, mais du combat Majorité - Opposition. Il s’agit donc d’un Non très clair au président Sarkozy. Déjà plus bas dans les sondages que ne l’a jamais été un président de la Vème République.

Il est grand temps pour lui de se remettre en question sur les sujets majeurs de sa stratégie politique. Car si les promesses purement économiques (dans son sens le plus strict) ont su être tenues, la crise a largement freiné leurs effets. Les autres promesses n’ont pas été honorées. Or, ne rêvons pas : l’immense majorité des électeurs n’ont pas voté pour le bouclier fiscal (qui bien sûr, ne concerne que peu de Français), mais pour des promesses bien plus ambitieuses. Rappelez-vous qu’il était le seul candidat à parler de plein emploi sur le moyen terme. Qu’il a fait croire que le travail acharné serait récompensé. Qu’il a promis la sécurité, etc.

En milieu de mandat, comment le président Sarkozy a-t-il échoué ? Émettre une hypothèse sur chacune des raisons de cet échec est trop ambitieux pour moi. Aussi en émettrais-je quelques unes pêle-mêle :

La surmédiatisation : efficace quand il s’agit de s’approprier un succès, elle est redoutable en cas d’erreur, et pas seulement. Prenons l’exemple des renvois des immigrés clandestins. Mis à part pour une poignée de neuneus, ces renvois ne sont pas une fin, mais un moyen : comment ont-ils été vendus ? En renvoyant ces clandestins, on économise en frais d’état (sécu, etc.), on fait reculer l’insécurité, etc. Un ministère créé simplement pour l’occasion, et des centaines de clandestins qui embarquent, en direct sur nos télés. Il n’y a pas moins d’insécurité, et les caisses de l’état sont toujours vides. Le fait de voir un gouvernement s’acharner à agir sans résultat démontre une profonde incompétence que l’état aurait mieux fait de garder confidentielle.

L’image que renvoie le président, par son manque de goût, de finesse, de la moindre culture, écorche mois après mois le rayonnement français à l’international, le fait mal voir de la couche populaire de son électorat, que sa position de nouveau riche méprisant dérange, aussi bien que de la couche plus aisée, électorat plus classique de l’UMP, dont il ne représente pas les valeurs.

Ni les médias, ni les opposants, ni même les membres de la majorité ne peuvent s’exprimer librement (est-il besoin de rappeler les ridicules actions de censure qui ont été menées, tant à l’encontre de journalistes, d’humoristes, ou de ministres), alors qu’on nous avait promis l’ouverture, qui lui avait permis de mettre à terre le MoDem. À quoi bon mettre au gouvernement des personnalités de tous bords s’ils doivent tous aller dans le même sens (il peut bien prendre un communiste en premier ministre, s’il est obligé d’acquiescer chacune des décisions ! ) ?, etc, etc, etc.

Quelle solution pour l’UMP aujourd’hui ? Elle est simple : que le président Sarkozy lâche du lest sur ses poulains. Qu’il ne se représente pas. Et c’est sur cette partie que je tiens à construire un raisonnement solide : Sa présence sur le devant de la scène nuit à son parti sur le long terme. À ne voir que lui, on lui associe toute la droite française. Il voulait en être le porte-drapeau, il en est l’assassin.

Il est vrai que peu de gens auraient donné le Président Chirac gagnant en 2002. Il semble qu’une comparaison frontale des deux président soit encore le meilleur moyen de solidifier mon propos : en 2002, le RPR jouissait d’une élection à 16 candidats, dont 6 seulement de droite (sachant que dans les 6 en question, on prend en compte ici l’UDF, à l’époque clairement considéré de centre-droit, et l’extrême droite, que se partageaient M. Le Pen, et M. Mégret). On sait que l’électorat de droite est plus coutumier du vote utile que celui de gauche. Or, il n’y avait pas de négativité dans le peu d’affection des droitistes pour le président Chirac : si la dissolution ne lui a jamais été pardonnée, on ne pouvait lui reprocher une inaction que la cohabitation lui forçait, et il ne parvenait pas à provoquer la répulsion qu’inspire aujourd’hui le président Sarkozy. On le sait, c’est le Front National qui a sauvé le président Chirac en 2002. Or, l’électorat a bien changé en bientôt 10 ans, et il convient de prendre en compte plusieurs éléments majeurs : une rénovation à venir du Front National (que je traiterai dans une prochaine chronicature), qui avalera la partie la plus dure des électeurs UMP (et je ne parle pas ici que des électeurs qui avaient été récupérés par le président Sarkozy aux dernières élections). Il n’est pas même besoin d’argumenter pour prévoir une importance croissante des Verts, qui deviendront un acteur très sérieux, avec lequel il faudra compter. Enfin, notons la possibilité de la présence de M. de Villepin, qui viendra peut-être s’ajouter à celle de M. Bayrou comme alternative sérieuse au Sarkozysme. Ces quatre entités sont autant de refuges pour un électorat de droite qui ne votera pas pour le président sortant.

Aussi j’insiste grandement sur le fait que les conclusions de ce raisonnement n’appartiennent qu’à moi, et que je suis ouvert à toute remarque, néanmoins, les voici : la présence du président Sarkozy au premier tour de l’élection 2012 pourrait agir comme un big bang au sein de la droite française, et répandre les électeurs potentiels en périphérie, ce qui pourrait provoquer un nouveau 21 avril inversé (PS-FN). C’est avec la grande prudence qu’impose un jugement à deux ans des élections que j’utilise le conditionnel pour donner ces hypothèses.

La crise financière nous a renvoyé, en pleine face les limites d’une politique ultra-libérale : la droite de demain devrait être plus conservatrice que libérale. Si un conservateur sort du lot aujourd’hui à droite, s’il peut librement s’exprimer sur la politique gouvernementale, s’il parvient à se montrer comme une alternative au président actuel, et que se dernier se désiste, il sera le futur président. Notre époque regarde vers le passé, parce que c’est là que survivent nos derniers repères rassurants. Ce n’est quand même pas un hasard si le président Chirac, qui reste le pire président de le Vème République, est aujourd’hui considéré par tous comme le père du peuple !!!

En gros, Martine Aubry est-elle notre future présidente ? Qui peut le dire ? La gauche succèdera-t-elle à la droite ? Pas forcément. Le président Sarkozy peut-il être réélu ? Non. À deux ans de la présidentielle, c’est déjà certain. Les promesses n’ont pas été tenues à temps, la conjoncture empêche tout plan qui n’en soit pas un de sauvetage, et le président n’est pas assez proche du peuple pour les faire passer.

On a vite fait de critiquer le peuple Français, qui refuse toute réforme d’austérité par rapport à nos voisins Allemands. Mais il suffit d’un rapide coup d’œil sur leur système politique pour comprendre que le peuple n’est pas le seul à s’interroger. Dans les commentaires d’une ancienne chronicature, on parlait du devoir d’exemplarité des politiques. Mon opinion est que, comme on pardonne aux services secrets d’agir de manière peu légale pour nous protéger, on peut aussi le pardonner des politiques, s’ils servent des enjeux nationaux, à condition que les citoyens ne le sachent pas, bien entendu. En tant que personnes publiques, l’exemplarité est un impératif formel, que le gouvernement allemand illustre parfaitement. Pourquoi l’ont-ils compris avant nous ? Parce que le système fédéral est par essence un système de proximité, où il n’est pas possible d’ignorer les besoins du citoyen. Aucune réforme ne passerait sans cette proximité. C’est un système qui doit évoluer, non pas le peuple. Et le président Sarkozy a fait un bond immense… dans le mauvais sens. Au lieu d’établir un vrai dialogue, il a bâti une frontière entre lui et les citoyens. Et il ne s’agit pas de la frontière qui sépare les grands hommes du commun des mortels : rien de l’attitude distante d’un de Gaulle, d’un Pompidou, ou d’un Mitterrand : le président Sarkozy transpire le mépris du petit chef. Et ce, dans ses discours aussi bien que dans ses actes. Personne d’accepte le changement lorsqu’il est dicté par un petit chef.

Comme toujours, ma chronicature n’est qu’une piste de réflexion. J’ose espérer que le raisonnement est maintenant assez construit pour être pris comme tel, et non comme une prise de position quelconque de ma part : je ne cherche pas à donner mon avis personnel, mais à tirer des hypothèses à partir de faits.

Bonne journée !

1 commentaire:

  1. Woua ! C'est tout de même plus joli en couleur !!! :)
    Merci !

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